Le syndrome de l’imposteur…

Cette question, nous nous la sommes tous posée. Elle nous a toujours hantés. Une question qui a plus qu’un impact symbolique sur les gens. LA question… Celle qui fait peur, celle qui mine l’estime de soi. La question qui glace, la question qui tue.

La question qui nous a tous touchés un jour ou l’autre dans notre carrière. La question qui, tout comme un mauvais compagnon, nous attend toujours dans un coin de notre inconscient. Le pire est que lorsque nous pensons avoir définitivement élucidé cette question, lorsque nous sentons que nous avons trouvé LA réponse, elle nous revient. Doucement, innocemment, presque sans que personne ne s’en rende compte. Et puis BANG, elle nous saute au visage…

Suis-je assez compétent pour faire ce que je fais ? Est-ce que je suis vraiment responsable de ces succès ou est-ce tout simplement de la chance ? Qui suis-je pour être dans ce rôle ou dans ce nouveau rôle ? Serai-je assez compétent pour accomplir ce que l’on attend de moi ?

Finalement, suis-je « un imposteur » ?

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Il y a près d’une quinzaine d’années, j’ai entendu cette expression pour la première fois. À la radio, le hockeyeur  Alexandre Daigle était interviewé. Vous vous souvenez de son histoire? Une histoire de hockey qui a marqué l’imaginaire dans les années 1990 au Canada et aux États-Unis.

Daigle avait été à son époque, une très grande vedette de hockey junior. Un espoir voué à remplacer les plus grands. Ce génie du hockey était alors comparé aux plus grandes vedettes de la Ligue nationale. Ainsi, durant sa première année dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec en 1991, Daigle fait sensation et les observateurs lui promettent un grand avenir et voient en lui un grand espoir de la LNH, certains n’hésitant pas à le comparer au grand Wayne Gretzky ou à Mario Lemieux.

Au cours du repêchage universel de la Ligue nationale de hockey en 1993, les Sénateurs d’Ottawa, ayant la toute première sélection, ont le choix entre trois vedettes potentielles de très haut niveau, soit Chris Pronger, Paul Kariya et Daigle. C’est finalement Daigle qui sera choisi.

De plus, les Sénateurs, accusés d’avoir délibérément perdu les derniers matchs de la saison pour le repêcher, lui proposent alors un contrat de 5 ans et de 12,25 millions de dollars. Une somme colossale pour l’époque. Tellement élevée que, la ligue mettra en place quelques années plus tard un plafond pour le premier contrat d’un joueur recrue.

Malheureusement pour lui, Daigle ne parviendra jamais à se hisser au niveau de sa réputation. Il est alors assez souvent critiqué en raison de son laxisme et d’une faible motivation. Au bout de quelques saisons, Daigle s’est mis l’ensemble du hockey d’Ottawa à dos et se voit transférer au cours de la saison 97-98. Il enchaîne alors une série de transferts plus ou moins réussis en passant par plusieurs équipes tant de la Ligue nationale que des ligues mineures, qui espèrent toujours être en mesure de démarrer le grand Daigle. Mais finalement, il quittera le hockey en 2000.

Et pour l’histoire, rappelons que Pronger que Kariya ont eu, eux, de grandes carrières dans la Ligue nationale au cours de ces années. Un choix que les Sénateurs regretteront longtemps.

C’est justement lors de cette décision de mise à la retraite qu’il avait donné une entrevue touchante avec beaucoup d’émotion. Il avait raconté la triste histoire d’un rêve perdu d’une confiance évaporée, d’une personnalité brisée. Un héros pour certains, un imposteur pour d’autres… et surtout pour lui.

Il était un imposteur dans un corps d’athlète. Ce syndrome l’a envahi à tel point qu’il a perdu toute confiance en lui. Sa belle carrière, ce beau rêve s’est transformé en cauchemar, ses espoirs partis en fumée. Plus important, il se disait atteint du « syndrome de l’imposteur ».

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Le syndrome de l’imposteur, qu’est-ce que c’est ?

Selon Wikipédia :
« Les personnes atteintes du syndrome de l’imposteur, appelé aussi syndrome de l’autodidacte, expriment une forme de doute maladif qui consiste essentiellement à nier la propriété de tout accomplissement personnel. Ces personnes rejettent donc plus ou moins systématiquement le mérite lié à leur travail et attribuent le succès de leurs entreprises à des éléments qui leur sont extérieurs (la chance, un travail acharné, leurs relations, des circonstances particulières). Elles se perçoivent souvent comme des dupeurs nés qui abusent leurs collègues, leurs amis, leurs supérieurs et s’attendent à être démasquées d’un jour à l’autre. »

« 60 à 70 % des personnes douteraient, à un moment ou à un autre de leur carrière, de la réalité ou de la légitimité de leurs succès. Ces pensées négatives sont généralement dépassées par une certaine clairvoyance, mais elles peuvent finir par devenir invalidantes. Ce syndrome touche notamment les types d’enfants et d’adultes perçus comme “à haut potentiel”, ou plus couramment nommés “surdoués”. »

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Lors de nos sessions de coaching, nous sommes très souvent confrontés à des éléments de ce syndrome, qui reviennent de temps à autre. Ainsi, nous avons une quantité de coachés qui un jour ou l’autre remettent en question leur avenir, leurs capacités, leurs objectifs et la légitimité de leurs accomplissements, remettant en question leurs véritables valeurs. Et finalement, confrontés aux défis, ils doutent qu’ils soient encore capables de le faire. Ils observent la montagne devant eux et se demandent encore une fois s’ils sont la personne de la situation.

Bien sûr, nous n’avons pas la prétention de jouer au psychologue et lorsque nous sentons que ces pensées deviennent invalidantes, nous suggérons au coaché d’en discuter avec un psychologue qui est mieux habilité que nous à l’aider. Mais malgré cela, plusieurs de nos coachés passent par ces phases de doutes de la réalité ou de la légitimité de leur carrière.

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Ainsi, suite à nos observations, voici quelques réflexions relatives à ce sujet délicat :

1. C’est une bonne chose de se poser des questions
En premier lieu, je crois qu’il est sain de se poser ses questions de temps à autre. Cela assure que dans un monde où tout va vite, où les meilleurs et les plus compétents sortent du lot, que nous offrions le meilleur à nos clients. Je crois que de se remettre en question est une attitude saine et que le fait de remettre en question les certitudes à l’occasion garantit un meilleur équilibre. Ces questions, ces doutes sont selon moi un « chien de garde » qui force le professionnalisme, l’acquisition de compétences et le renouvellement des connaissances. C’est aussi grâce à ces questions que je crois que nos clients sont le mieux servis. Ainsi, ce doute, ces questions évitent le laxisme, l’immobilisme, et forcent les professionnels à être meilleurs et à atteindre leur plein potentiel. En fait, c’est une bonne chose.

2. À trop se poser de question, on n’avance pas
Mais malheureusement trop souvent, se poser des questions a un effet pernicieux, soit celui d’affecter l’estime de soi et d’empêcher les gens de se lancer véritablement. Dans certains cas, et plus particulièrement lorsqu’ils sont sujets à une pression très grande, ou font face à un défi important à leurs yeux, ils risquent de remettre en doute les succès et les acquis. Doucement, le stress, la pression s’abattent sur eux. Ils sont alors incapables « d’oser ». Ils se retrouvent immobiles dans leur situation, figés, glacés de doutes, ce qui crée inévitablement un sentiment de « peur de se tromper ». Quelquefois, il « faut juste y aller »!

3. Les professionnels sont par nature plus sensibles
Il faut aussi remarquer qu’il est dit dans la définition que « Ce syndrome touche notamment les gens perçus comme “à haut potentiel”, ou plus couramment nommés “surdoués” ». Comme Alexandre Daigle était perçu comme un surdoué dans son domaine, une grande quantité de professionnels de haut niveau sont, à leur façon des « surdoués », et des personnes « à haut potentiel ». De plus, leur entourage immédiat et surtout eux-mêmes sont pour la plupart du temps très exigeants envers eux, que ce soit professionnellement ou personnellement. Et cette pression des autres est rarement de la mauvaise foi, mais simplement la volonté de stimuler le plein potentiel de ces « surdoués ». De plus, cette pression, ajoutée aux préoccupations du moment ainsi qu’à la valorisation de la performance, installe pour ceux qui y sont plus sensibles, un ensemble de conditions favorables permettant justement le développement du « syndrome de l’imposteur ». Finalement, les gens qui y sont sensibles ont tout ce qu’il faut pour tomber dans la spirale infernale de la perte d’estime de soi.

4. Dans le doute, parlez-en!
Sans toutefois prendre la place du psychologue, nous croyons en premier lieu qu’il est important de nommer les choses. Prendre conscience de la situation est souvent le début de la guérison. Alors, si vous sentez que votre estime de vous-même est affectée, il est grand temps d’en parler avec des gens habiletés à vous aider. Dans un premier temps, parlez-en à des gens de confiance avec qui vous pourrez vous ouvrir et exprimer vos doutes. Ne vous enfermez pas dans un mutisme professionnel ou personnel, qui exigera de vous une telle énergie qu’il vous sera difficile même d’affronter vos propres doutes. À l’occasion, une douce oreille peut vous donner du courage, rehausser votre estime de vous-même, et reprendre confiance en vous. Donc, n’hésitez pas à en parler avec des gens de confiance. Vous pourriez être surpris de découvrir des facettes nouvelles de gens que vous pensiez connaître.

5. Créez-vous un dossier TLC
Un des éléments que je suggère de faire à mes coachés lorsque le doute s’empare d’eux est de se créer un dossier TLC. TLC pour « Tender, Love and Care ». Qu’est-ce que c’est ?

Tout au long de notre vie professionnelle ou personnelle, nous recevons à l’occasion des petits mots gentils, des appréciations qui nous font plaisir. Un client qui vous dit un merci particulier, un ami que vous avez supporté dans une situation difficile, une belle évaluation, un mot gentil de votre amoureux/amoureuse, etc. Ces petites choses qui font du bien à l’âme une fois de temps en temps. Trop souvent, une fois que nous avons lu ces messages, ils disparaissent ensuite au fond de notre boîte de courriel ou au fond d’un tiroir. Nous les perdons dans le tumulte de notre vie.

Donc, pour ne pas les perdre, je suggère de les placer dans un dossier, qu’il soit virtuel, électronique, ou physique, dans un endroit « où vous seul pourrez les consulter ». Et finalement, lorsque vous sentirez le doute s’installer, lorsqu’une personne vous lancera une flèche méchante et que sous votre carapace, vous sentez la douleur, allez retrouver ce dossier et prenez quelques minutes pour prendre une « bouffée d’estime de soi » comme le dit mon ami Richard Aubé, auteur.

6. Créez votre « temple de la renommée » personnel
Tout au long de notre vie, nous avons accompli des choses, réalisé des rêves, escaladé des montagnes, atteint des buts dont nous pouvons être fiers aujourd’hui. Par contre, nous oublions souvent trop rapidement ce que ces réalisations signifient, et l’importance de ces succès.

Alors, un autre élément que je suggère est de vous créer un « petit corridor d’accomplissement » unique à vous-même, ou vous pourrez aussi vous ressourcer au besoin. Encore une fois, qu’il soit physique, virtuel ou psychologique, imagez vos gloires et illustrez-les quelque part. Que ce soit dans votre bureau, votre garage, votre chambre, votre ordinateur, votre téléphone, illustrez ces éléments qui vous permettront encore une fois d’être fier de ce que vous avez accompli.

7. Si les doutes persistent malgré tout, faites-vous aider!
« À chacun son métier et les vaches seront bien gardées », me disait ma grand-mère. La maxime s’adresse aussi à ce genre de situation. Jamais vous n’oseriez confier la rédaction des états financiers de votre firme à un mécanicien inconnu, ou la réparation de votre voiture de luxe à un avocat choisi dans les Pages jaunes. Alors, en ce qui a trait à votre équilibre mental, faites la même chose. Ce n’est pas mal de se faire aider, de se faire supporter. Il y a des gens compétents pour qui c’est le métier d’aider les autres à performer. N’hésitez pas à demander, vous vous en sortirez beaucoup plus fort.

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Finalement pour la petite histoire, Alexandre Daigle s’est fait aider. Il est revenu au hockey quelques années plus tard dans la Ligue nationale et il a terminé sa carrière de hockeyeur professionnel en Suisse, loin de la pression nord-américaine, où il a terminé une belle carrière. Il est revenu au Québec en préparant bien les choses et il a du succès dans le monde des affaires. Il se dit heureux avec ses trois enfants et se tient loin des projecteurs. Il a trouvé sa niche, son monde, son bonheur.

Il est possible de retrouver son équilibre et d’exploiter son plein potentiel. Il faut juste le faire de la bonne façon, et prendre véritablement conscience de notre potentiel.

Faites-le en premier lieu pour vous et non pas pour personne d’autre.

Vous serez encore plus heureux!

 

 

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